Chroniques trantoriennes

04 janvier 2007

Darren Aronofsky ? C'était mieux avant...

Darren Aronofsky a toute notre attention depuis ses deux premiers longs-métrages, Pi (1998) et Requiem for a dream (2000). Son troisième opus exigeait donc que l'on s'y plongeât sans tarder. Aussi était-ce avec une certaine impatience que j'attendais The Fountain. Mais la déception s'est avéré à la hauteur de l'attente.

On aurait pourtant dû se méfier, au vu du précédent scénario de Aronofsky, celui de Abîmes (2002), réalisé par David Twohy. Cette histoire de fantômes à bord d'un sous-marin américain lors de la Seconde Guerre mondiale révélait à la toute fin une énorme incohérence, coulant à pic un film pourtant réussi jusque là. Mais Abîmes étant crédité de trois scénaristes, Aronofsky pouvait-il en être tenu pour responsable ? La question semble avoir trouvé un élément de réponse, après le visionnage de The Fountain.

Certes, il s'agit bien là pour le réalisateur d'un troisième ovni cinématographique. Certes, on peut trouver à certaines images une véritable esthétique. Certes, on peut estimer que Aronofsky a quelque chose à nous dire. Mais... il n'a rien à raconter. Par ailleurs, le message qu'il nous livre ici est d'une effarante banalité.

S'il émanait d'un étudiant en cinéma peu doué, on pourrait avoir une certaine considération pour ce putatif film de fin d'études, que l'on imaginerait financé par un papa richissime (le budget de ce film intimiste se monte tout de même à 35 M$). Mais ce fantasmé caprice de fils à papa ne mérite pas la même compassion lorsqu'il s'avère être l'oeuvre de Darren Aronofsky. Et il faut être clairvoyant au dernier degré pour reconnaître dans The Fountain la patte de l'auteur-réalisateur.


Tout d'abord, le sens du montage qui faisait de Pi et de Requiem... des oeuvres envoûtantes laisse ici la place à un manque de rythme flagrant, plombé par des images redondantes et une alternance souvent malheureuse des trois segments de l'histoire.

Je dis bien l'histoire et non le scénario, car de scénario il ne saurait être question dans The Fountain. Aronofsky tente de nous conter le combat d'un homme pour sauver la femme qu'il aime, et ce à trois époques différentes : 1500 - 2000 - 2500. Sauf que le couple est interprété par les deux mêmes acteurs, lesquels figurent en fait les mêmes personnages. Les amants éternels ! Wouah ! Brillant ! On ne nous l'avait jamais faite, celle-là...

Le film ressemble au final à un mille feuilles de trois décalques de la même histoire. En une heure et demie de film, on comprend qu'aucune de ces trois époques ne soit convenablement fouillée. Idem pour les personnages, à peine esquissés.

Mais Aronofsky avait gardé le pire pour la fin. Lorsque le mari de l'an 2500 s'élève vers l'étoile mourante, en position du lotus et en contre-jour, on a droit à un trip new age de la pire espèce qu'on croit tout droit sorti d'une monographie de l'AMORC. Au moins, ces images grotesques ont le mérite de tirer le spectateur de sa torpeur.

Certains critiques ont été apparemment séduits par la magie hypnotique du film. La seule explication rationnelle à ce phénomène est qu'ils soient tombés de sommeil dans leur fauteuil. À leur réveil, sur le générique de fin, ces "connaisseurs" auront au moins partagé une chose avec le spectateur insomniaque : la sensation de ne pas très bien savoir ce qu'ils faisaient là.

Sur un même thème et avec un traitement relativement similaire on préfèrera de (très) loin Solaris. Non non, pas le Tarkowski, mais son étonnant remake par Steven Soderbergh. Si vous êtes dans votre période mystico-science-fiction, c'est celui-là qu'il faut (re)voir.

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