Chroniques trantoriennes

07 septembre 2007

Cassandre à 2.0 sous

Ignare mais fasciné, voilà qui résume assez bien mon état il y a encore une semaine à l'égard des récentes orientations de l'Internet. Comme quoi on a beau tenir un blogue et le personnaliser, on peut n'en demeurer pas moins à la traîne.

Désireux de monter une application professionnelle orientée communauté virtuelle, il me fallait donc impérativement me familiariser à titre personnel avec ces outils et concepts étranges portant des noms aussi poétiques que agrégateur de flux RSS, crowdsourcing, wiki et autres folksonomy. J'ai finalement sauté le pas et plongé dans le grand bain des nouvelles technologies de l'information.

J'ai ainsi découvert que, à l'image d'un Mounsieur Jourdain de l'ère numérique, je faisais déjà du web 2.0 sans le savoir. L'application que je développe actuellement répond en effet à la dénomination de mash-up.

Pour le reste, voilà belle lurette que j'ai recours au remarquable gestionnaire de favoris en ligne Del.icio.us (avec l'extension ad hoc pour Firefox, évidemment, parce que, avec Internet Explorer, ça revient à mettre un moteur de Porsche sur une De Dion-Bouton). Mais je n'utilise absolument pas son côté partage des favoris avec les internautes, fonctionnalité qui m'apparaît hautement superflue. Dans le même ordre d'idées, je reste totalement hermétique à Fuzz et autres Digg qui, au bout du compte, n'en viennent ni plus ni moins qu'à établir un hit-parade des liens Internet. Tout comme d'ailleurs Technorati qui propose en outre un moteur de recherche sur les blogs qui a la mauvaise habitude de ne jamais rien trouver de pertinent. Pendant ce temps-là, Google (et notamment son système Page Rank) fait tout ça bien mieux sans se limiter aux seuls blogs. Dans le genre inutile, j'ai aussi relevé Twitter, une sorte d'espace de mini-blogging afin de laisser savoir à sa communauté virtuelle ce que l'on est en train de faire en temps réel. Si vous avez moins de 15 ans, pourquoi pas ?

Mais si on veut bien faire abstraction de ces gadgets, on découvre que le Web 2.0 recèle d'autres applications proprement fascinantes.

C'est notamment le cas des gestionnaires d'espaces personnels et de communautés virtuelles. Un secteur qui n'est d'ailleurs pas épargné par l'évolution rapide des technologies. Ainsi, MySpace, précurseur créé en 2003, a beau compter 90 millions de membres, il est aujourd'hui totalement dépassé. Notamment par un produit qu'il ne vaut mieux pas mettre entre les mains d'un individu shooté au Web : la nouvelle plate-forme de blogue et de communauté virtuelle de Six Apart, j'ai nommé Vox.com : une vraie merveille de ressources, de convivialité et de flexibilité. Si vous devez commencer un blogue (et l'orienter communauté virtuelle) aujourd'hui, c'est là qu'il faut aller.

Dans le genre facteur de dépendance élevé, j'ai également découvert Netvibes, un agrégateur de flux RSS. Aha ! Kézaco ? En fait, il s'agit d'une page web (eh oui, c'est du Web 2.0) sur laquelle vous pouvez faire figurer un nombre quasi illimité de cases dans lesquelles apparaissent les nouveautés publiées sur n'importe quel site disposant d'un flux RSS. Vous savez, la petite icône orange, là, en dessous.

Le navigateur Firefox (qui fait ressembler Internet Explorer 7 à un boulier chinois déglingué) intègre ces flux directement à son interface, mais lorsque vous en avez plus d'une dizaine à gérer, mieux vaut disposer d'une page web spécialement dédiée. Et là, Netvibes fait remarquablement le boulot. J'avais un temps essayé d'utiliser la page similaire de Yahoo, mais ça m'avait vite gavé. Netvibes est d'un autre acabit.

Et après cela, je me suis lancé sur FaceBook. Alors là, Watch out ! Highly addictive app ! Vous êtes prévenus. Avec ce machin absolument redoutable, vous créez une page sur laquelle figurent votre état-civil, votre background scolaire et universitaire, votre secteur professionnel,... et vous pouvez ainsi retracer d'éventuels camarades de promo ou de boulot qui auraient eu la même (bonne) idée de se créer un profil sur le site. Via une kyrielle de groupes, tout internaute peut rejoindre une assemblée de personnes qui partagent ses goûts,... Bref, vous créez et/ou développez votre communauté virtuelle et y restez connecté. FaceBook propose également des greffons (1) tels que iLike, Flickster et TVshows, grâce auxquels vous présentez à vos relations numériques vos musiques, films et séries TV préférés. Ma communauté est pour l'heure des plus restreintes, mais FaceBook m'a déjà sérieusement accroché.

On l'aura compris, cet outil est fascinant. Et en tant que produit révolutionnaire, il s'attire bien évidemment les foudres d'une cohorte de braillards désinformés. Souvenez-vous, il y a 10 ans : Internet, le grand Satan. C'étaient déjà eux. Que nous hurlent aujourd'hui aux oreilles ces rabat-joie patentés, nostalgiques du télégraphe et consultants en sécurité à la petite semaine ?

« Attention ! FaceBook, Ah la la ! Pas bien ! Mauvais ! Belzébuth s'est déguisé en paquets de 0 et de 1 !
- Allons bon, expliquez-moi donc ça.
- Eh ben, lorsque vous insérez des détails concernant votre identité dans votre profil FaceBook, des internautes malintentionnés pourraient les relever pour usurper votre identité.
- Vous avez des exemples à nous donner des ravages de l'usurpation d'identité ?
- Euh, non. Mais c'est vachement grave...»

Voilà de jolies paroles bien insensées de la part de personnes bien incultes. Un peu comme si je hurlais à la cantonnade : « L'énigme du chat de Schrödinger est une arnaque ! » À moi, cons, deux mots.

1 - Tout d'abord, votre profil FaceBook n'apparaît qu'aux personnes que vous avez autorisées à intégrer votre communauté. Ensuite, vous pouvez librement déterminer quels détails de votre profil apparaîtra aux membres de ladite communauté (3 niveaux possibles : tout le monde, réseaux, amis). Quant à l'onglet privacy, il permet de gérer de façon très complète la confidentialité de ces données.

2 - Il y a 25 ans, Coluche nous parlait des « cons qui laveraient le linge à l'eau sale ». FaceBook nous fait découvrir les cons qui mettraient ouvertement en ligne :
  • leur numéro de carte de crédit,
  • leur code secret,
  • leur adresse physique,
  • l'endroit où ils cachent la clef de secours, dans le pot de fleurs, là, sur la fenêtre, à gauche de la porte d'entrée,
  • les horaires durant lesquels ils sont absents de chez eux.
Il est vrai que l'usurpation d'identité est une forme de criminalité à prendre attentivement en considération. Mais au lieu de crier au loup, on ferait mieux d'expliquer en quoi c'est une menace. En substance, les journaleux nous disent ceci :

« Attention !!!
- Quoi ! Qu'est-ce qu'il y a ?
- Ben attention.
- À quoi ?
- À rien.
- Ben, pourquoi tu me dis de faire attention ?
- Pour rien... Non, mais fais gaffe quand même...»

Ils voudraient qu'on soit intelligent et ils nous prennent pour des cons.

nous disait le même visionnaire Coluche.

Pendant ce temps là, ces conseilleurs-mais-pas-payeurs laissent en évidence le recto de leur carte de crédit sur les tables des cafés, ne cachent pas le clavier du terminal de paiement lorsqu'ils tapent leur code secret, balancent dans les poubelles publiques leur ticket carte bleue sitôt leurs emplettes achevées,... Mais rassurez-vous : s'ils sont victimes d'une fraude aux moyens de paiement, ce sera la faute à Internet, au cours du dollar australien et à la précession des équinoxes.

FaceBook est un outil étonnant et sûr, pourvu qu'on ait trois neurones. Si vous n'en avez que deux, là, effectivement, il y a un risque.
___________________________________

(1) En français de France : plug-ins.

Libellés :