Chroniqueur culturel québécois, laisse parler le René Simard qui est en toi !
Note à l'attention des non-résidents québécois : René Simard est un présentateur télé québécois à côté de qui Michel Drucker, c'est Belzébuth.
Le chauvinisme de la presse culturelle québécoise ne laisse de me surprendre. Lorsqu'un chroniqueur (ou une chroniqueuse… ou chroniqueure, je ne connais pas la règle lexicale…) se penche sur un artiste québécois… C'est formidable. C'est comme si l'esprit critique des journalistes estampilés "arts et spectacles" s'arrêtait aux frontières de la Belle Province. Deux exemples flagrants me sont tombés dessus le même jour.
Tout est bon dans le cochon culturel québécois, à commencer par l'art contemporain qui, comme chacun sait, est à notre temps ce que Lascaux fut à la préhistoire. J'en veux pour preuve la chronique de Catherine Perrin, sur la première chaîne radio de Radio-Canada, hier matin. Parlant de la Biennale de Montréal (exposition d'art contemporain dans plusieurs sites de la ville), Madame Perrin nous narre sa visite à une école qui a prêté certains de ses locaux pour permettre à des artistes d'y exposer leurs œuvres.
La journaliste nous dit alors que cette initiative est « peut-être une fausse bonne idée» car, lorsque l'artiste n'a pas eu le temps de s'approprier son espace d'exposition, cela se ressent sur la qualité de présentation de ses œuvres. Le spectateur serait ainsi parasité par le cadre de l'exposition, « parfois de façon dramatique car cela entretient certains clichés négatifs sur l'art contemporain, que c'est un peu n'importe quoi». Elle déclare qu'en entrant dans certaines salles d'exposition,
Il faut-tu pas être snobe en tabarnane pour parler de même ? Eh, Mme Perrin, t'habiterais-tu pas sur le Plateau ?
Traduction des propos de la susmentionnée :
1- Si vous entrez dans une salle d'exposition et que vous ne voyez dans l'œuvre accrochée au mur (des photos de cactus) que des photos de cactus, vous êtes un moron, c'est-à-dire un imbécile. Merci, Mme Perrin; avec ce genre de phrases, on constate effectivement que vous avez une grande ouverture d'esprit !
2- Si vous trouvez que l'œuvre exposée est une bouse, vous n'y êtes pas : ce n'est pas la faute de l'artiste québécois (qui a pourtant à l'évidence autant de talent pictural qu'un sasquatch). Non non, c'est la faute aux conditions d'exposition de l'œuvre !
C'est pas de la belle bullshit, ça ?! Mme Perrin, s'il faut que vous soyez placée en caisson d'isolation sensorielle pour apprécier une œuvre, c'est que votre sensibilité artistique vole au ras des pâquerettes.
Personnellement, j'estime qu'une œuvre est belle lorsqu'elle continue de fasciner quelles que soient les circonstances dans lesquelles on la voit ou on l'entend. Dans le cas contraire, il faudrait considérer La Joconde comme une horreur, sous prétexte qu'on ne peut pas la voir correctement au Louvre, dissimulée en permanence derrière un rideau de touristes japonais qui jouent aussi fréquemment du flash de leur appareil photo numérique que d'autres clignent des yeux.
Dans le même ordre d'idées, je peux tout aussi bien regarder Metropolis de Fritz Lang religieusement sur une toile de cinéma de 30 mètres de base que sur l'écran de 7 pouces de mon lecteur DVD portable, dans un train : le film reste un chef d'œuvre monumental.
Si on en est rendu à estimer qu'une œuvre d'art contemporain serait magnifique si seulement elle était présentée dans un cadre adéquat, dans de bonnes circonstances, c'est peut-être bien tout simplement que, pour cette œuvre, les meilleures conditions d'éclairage sont le noir complet.
Eh, Catherine, lâche-toi ! Dis-y que ces photos de cactus, c'est vraiment n'importe quoi !
Mais la journée ne faisait que commencer. Quelques heures plus tard, je tombe sur un article d'Alexandre Vigneault, chroniqueur musical au quotidien montréalais La Presse. Il nous y parlait du dernier concert du groupe Arcade Fire à Montréal. Groupe montréalais (donc québécois) francophone et anglophone (c'est bon ça, le cosmopolitisme, ça fait capoter les chroniqueurs culturels), Arcade Fire a sorti deux albums: un bijou (Funeral en 2004), et une daube (Neon Bible en 2007).
Comme je l'ai déjà mentionné sur ce blog, l'emballement de 2004 est plus que mérité, tandis que celui de cette année est particulièrement surfait. Peu avant la sortie officielle de Neon Bible, en février dernier, le même Alexandre Vigneault de La Presse ne tarissait apparemment pas d'éloges sur la galette. Mais dans le même temps, en lisant entre les lignes, on constatait que le journaliste n'osait pas dire clairement que le second opus était décevant. Ainsi, suite à un concert à la Fédération Ukraininenne (Montréal), il écrivait :
Et nous revoilà, trois mois plus tard, avec le même Vigneault, après deux concerts successifs à l'aréna Maurice-Richard :
De l'art de dire une chose et son contraire. Ce n'est pas que Neon Bible est moins bon que Funeral… Ben non, c'est sûr. En tant que journaliste culturel au Québec, on n'a pas le droit de tirer sur un étendard québécois agité à l'international. Alors on utilise des périphrases et des pirouettes de pigiste.
Ainsi, les chansons du second album présentées en concert n'ont pas été « conçues pour être partagées ». On se demande bien ce qu'elles foutent au programme d'un concert grand public !
Ça serait-tu pas parce que les chansons de Neon Bible sont poches en crif ? Que nenni ! Le responsable, c'est l'acoustique ! Cette salle de concert est nulle. Jouée deux fois en deux jours, la chanson « Black Mirror ne passe toujours pas la rampe». La faute à l'acoustique, on vous dit.
Parce que, Black Mirror, c'est un monument. Rien que les paroles déjà, c'est une anthologie :
En français dans le texte. Arrêtez de rire dans le fond !
Bizarrement, pour Vigneault, lorsque le groupe entonne les tubes du premier album, l'acoustique cesse d'être un problème. Allez Alexandre, lâche-toi ! Dis-le qu'il est pas bon, c't asti d'album !
Le chauvinisme de la presse culturelle québécoise ne laisse de me surprendre. Lorsqu'un chroniqueur (ou une chroniqueuse… ou chroniqueure, je ne connais pas la règle lexicale…) se penche sur un artiste québécois… C'est formidable. C'est comme si l'esprit critique des journalistes estampilés "arts et spectacles" s'arrêtait aux frontières de la Belle Province. Deux exemples flagrants me sont tombés dessus le même jour.
Tout est bon dans le cochon culturel québécois, à commencer par l'art contemporain qui, comme chacun sait, est à notre temps ce que Lascaux fut à la préhistoire. J'en veux pour preuve la chronique de Catherine Perrin, sur la première chaîne radio de Radio-Canada, hier matin. Parlant de la Biennale de Montréal (exposition d'art contemporain dans plusieurs sites de la ville), Madame Perrin nous narre sa visite à une école qui a prêté certains de ses locaux pour permettre à des artistes d'y exposer leurs œuvres.
La journaliste nous dit alors que cette initiative est « peut-être une fausse bonne idée» car, lorsque l'artiste n'a pas eu le temps de s'approprier son espace d'exposition, cela se ressent sur la qualité de présentation de ses œuvres. Le spectateur serait ainsi parasité par le cadre de l'exposition, « parfois de façon dramatique car cela entretient certains clichés négatifs sur l'art contemporain, que c'est un peu n'importe quoi». Elle déclare qu'en entrant dans certaines salles d'exposition,
je me sentais un peu comme la morone qui entre et qui dit "Ben voyons donc, des photos de cactus…". C'est pas mon genre. D'habitude, je suis plus ouverte que ça.
Il faut-tu pas être snobe en tabarnane pour parler de même ? Eh, Mme Perrin, t'habiterais-tu pas sur le Plateau ?
Traduction des propos de la susmentionnée :
1- Si vous entrez dans une salle d'exposition et que vous ne voyez dans l'œuvre accrochée au mur (des photos de cactus) que des photos de cactus, vous êtes un moron, c'est-à-dire un imbécile. Merci, Mme Perrin; avec ce genre de phrases, on constate effectivement que vous avez une grande ouverture d'esprit !
2- Si vous trouvez que l'œuvre exposée est une bouse, vous n'y êtes pas : ce n'est pas la faute de l'artiste québécois (qui a pourtant à l'évidence autant de talent pictural qu'un sasquatch). Non non, c'est la faute aux conditions d'exposition de l'œuvre !
C'est pas de la belle bullshit, ça ?! Mme Perrin, s'il faut que vous soyez placée en caisson d'isolation sensorielle pour apprécier une œuvre, c'est que votre sensibilité artistique vole au ras des pâquerettes.
Personnellement, j'estime qu'une œuvre est belle lorsqu'elle continue de fasciner quelles que soient les circonstances dans lesquelles on la voit ou on l'entend. Dans le cas contraire, il faudrait considérer La Joconde comme une horreur, sous prétexte qu'on ne peut pas la voir correctement au Louvre, dissimulée en permanence derrière un rideau de touristes japonais qui jouent aussi fréquemment du flash de leur appareil photo numérique que d'autres clignent des yeux.
Dans le même ordre d'idées, je peux tout aussi bien regarder Metropolis de Fritz Lang religieusement sur une toile de cinéma de 30 mètres de base que sur l'écran de 7 pouces de mon lecteur DVD portable, dans un train : le film reste un chef d'œuvre monumental.
Si on en est rendu à estimer qu'une œuvre d'art contemporain serait magnifique si seulement elle était présentée dans un cadre adéquat, dans de bonnes circonstances, c'est peut-être bien tout simplement que, pour cette œuvre, les meilleures conditions d'éclairage sont le noir complet.
Eh, Catherine, lâche-toi ! Dis-y que ces photos de cactus, c'est vraiment n'importe quoi !
Mais la journée ne faisait que commencer. Quelques heures plus tard, je tombe sur un article d'Alexandre Vigneault, chroniqueur musical au quotidien montréalais La Presse. Il nous y parlait du dernier concert du groupe Arcade Fire à Montréal. Groupe montréalais (donc québécois) francophone et anglophone (c'est bon ça, le cosmopolitisme, ça fait capoter les chroniqueurs culturels), Arcade Fire a sorti deux albums: un bijou (Funeral en 2004), et une daube (Neon Bible en 2007).
Comme je l'ai déjà mentionné sur ce blog, l'emballement de 2004 est plus que mérité, tandis que celui de cette année est particulièrement surfait. Peu avant la sortie officielle de Neon Bible, en février dernier, le même Alexandre Vigneault de La Presse ne tarissait apparemment pas d'éloges sur la galette. Mais dans le même temps, en lisant entre les lignes, on constatait que le journaliste n'osait pas dire clairement que le second opus était décevant. Ainsi, suite à un concert à la Fédération Ukraininenne (Montréal), il écrivait :
« Les meilleurs moments du concert d'hier ont été liés à des chansons tirées de Funeral et non aux nombreux titres à paraître le mois prochain sur Neon Bible. Un peu parce que les nouvelles chansons, presque toutes faciles à trouver sur Internet, n'ont pas eu le temps de vivre dans le coeur des fans, mais aussi parce que plusieurs d'entres elles tranchent avec le côté exutoire de Funeral.
Neon Bible s'annonce comme un album sombre, voire très noir, où Win Butler exorcise de vieilles peurs nocturnes. Ça donne parfois des morceaux lourds (…) qui s'intègrent encore assez mal au reste du répertoire. (...) On sait toutefois que The Arcade Fire demeure un fabuleux groupe de scène. On pressent toutefois que, lorsqu'il sera plus à l'aise dans l'ensemble de ses ambitieuses manoeuvres orchestrales nocturnes, ses prestations seront envoûtantes du début à la fin.
Et nous revoilà, trois mois plus tard, avec le même Vigneault, après deux concerts successifs à l'aréna Maurice-Richard :
(...) Une manifestation de joie qui fut de courte durée puisque la première chanson au programme a été Black Mirror, morceau aussi sombre que son titre. No Cars Go, tout de suite après, a confirmé notre pire crainte: l'acoustique de l'aréna Maurice-Richard allait gâcher une partie du plaisir qu'on avait à retrouver Arcade Fire. Devant, au parterre, la sono était brouillonne. Derrière, toujours au parterre, la réverbération était telle qu'on se serait cru dans un sous-sol d'église. Impossible de goûter pleinement les élégants arrangements musicaux mêlant guitares rock, cuivres et violons. Même pour les voix, c'était souvent limite.(…) Black Mirror ne passe toujours pas la rampe (…).
Il demeure que les chansons anciennes continuent de voler la vedette aux plus récentes. Ce n'est pas que les titres de Neon Bible sont moins inspirés, simplement que certains morceaux, Tunnels, Power Out, Rebellion et Wake Up, semblent avoir été expressément conçus pour être partagés. Pour être chantés en choeur dans la joie et un minimum de désordre. Même l'acoustique défaillante de l'aréna Maurice-Richard ne peut rien contre cette fièvre-là.
De l'art de dire une chose et son contraire. Ce n'est pas que Neon Bible est moins bon que Funeral… Ben non, c'est sûr. En tant que journaliste culturel au Québec, on n'a pas le droit de tirer sur un étendard québécois agité à l'international. Alors on utilise des périphrases et des pirouettes de pigiste.
Ainsi, les chansons du second album présentées en concert n'ont pas été « conçues pour être partagées ». On se demande bien ce qu'elles foutent au programme d'un concert grand public !
Ça serait-tu pas parce que les chansons de Neon Bible sont poches en crif ? Que nenni ! Le responsable, c'est l'acoustique ! Cette salle de concert est nulle. Jouée deux fois en deux jours, la chanson « Black Mirror ne passe toujours pas la rampe». La faute à l'acoustique, on vous dit.
Parce que, Black Mirror, c'est un monument. Rien que les paroles déjà, c'est une anthologie :
(Win Butler :) Un deux trois, le miroir noir !
(Les chœurs :) Un deux trois, le miroir noir !
En français dans le texte. Arrêtez de rire dans le fond !
Bizarrement, pour Vigneault, lorsque le groupe entonne les tubes du premier album, l'acoustique cesse d'être un problème. Allez Alexandre, lâche-toi ! Dis-le qu'il est pas bon, c't asti d'album !
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