Chroniques trantoriennes

23 juin 2007

L'éternel retour du samouraï aux grandes oreilles

Il y a toujours quelque chose à célébrer, disait la publicité pour une boîte de chocolats. C'est tellement vrai. Ainsi l'annonce de la prochaine parution du tome 12 de la bande dessinée Usagi Yojimbo.

Allons bon ! Le voilà qui se met à la littérature enfantine… allez-vous penser en découvrant l'image ci-dessous. Et vous aurez raison… Mais à moitié seulement. Car la BD Usagi Yojimbo est le genre de création populaire qui paraît ne cibler que les enfants pour mieux fasciner les adultes.

Au même titre que Buffy contre les Vampires, qui comme chacun sait n'est qu'une « niaiserie pour adolescent décérébré» (TM - © - tous droits réservés). Sauf que, dans quinze ans, cet ex-adolescent décérébré, revoyant ce feuilleton à l'occasion d'une crise de maturité, va découvrir une tout autre série, un ensemble dramatique exceptionnel qui lui avait complètement échappé…

Usagi Yojimbo est de la même veine. La BD raconte les aventures d'un lapin rônin (?), un samouraï sans maître, au cœur d'une époque qui a tout du Japon féodal de l'ère Tokugawa (XVIIème-XIXème siècle).

Tout d'abord, une mise au point essentielle : l'auteur de cette bande dessinée, Stan Sakai, est Américain, de même que Fantagraphics Books, la maison d'édition de la version originale de l'œuvre. On considère donc généralement qu'il s'agit d'une BD américaine, un comic book. C'est à mon sens une belle erreur. Tout, dans Usagi Yojimbo, nous ramène au manga, la BD japonaise. Le sujet de l'œuvre et le monde dans lequel évolue notre héros aux grandes oreilles renvoient explicitement au Japon. Par ailleurs, Stan Sakai est né au Japon. On objectera alors que 1) il n'y a vécu que très peu de temps avant d'être élevé aux Etats-Unis et 2) un BDiste d'origine japonaise peut dessiner des histoires inspirés du Japon médiéval sans pour autant faire du manga. Qu'est-ce qui justifie donc cette appellation pour Usagi Yojimbo? Et est-ce vraiment important qu'il s'agisse d'un manga? Après tout, ce n'est jamais que de la BD…

Si vous le pensez, c'est que vous n'avez jamais ouvert un manga de votre vie. Je ne parle pas des manga pour enfants dont la qualité varie grandement selon les titres (il est clair que Yu-Gi-Oh et Bey Blade ne sont pas les meilleures séries pour se faire la main en la matière). En revanche, dès qu'on tombe dans le manga pour adolescents ou pour adultes, on se trouve plongé dans une expérience artistique majeure. Tout d'abord, graphiquement, les manga font montre d'une maîtrise impressionnante de la mise en case. Inspirée à la fois des arts graphiques modernes et de la mise en scène de cinéma (et pas seulement d'animation…), elle se révèle d'une redoutable efficacité tout en ne perdant jamais de vue son but premier : se mettre au service de l'histoire. Or, dans leur grande majorité, les BD japonaises font montre de qualités scénaristiques largement supérieures aux comic books. Seuls une poignée d'auteurs américains sont parvenus à atteindre ces sommets (Neil Gaiman, Alan Moore et, bien sûr, Frank Miller, pour ne citer que les plus célèbres). Et si l'on pousse cette comparaison des qualités dramatiques encore plus à l'Est, force est de constater que, à côté du manga, l'école franco-belge, c'est Sylvain et Sylvette

Mais il y a dans le manga un aspect encore plus important que le scénario. Une BD japonaise qui se respecte révèle en effet des personnages d'une complexité fascinante Une dimension que bien peu d'auteurs de comic books ont intégrée (notamment Stan Lee et Frank Miller, encore) et qu'aucun BDiste franco-belge ne semble avoir seulement comprise.

Avec ses fabuleux personnages, Usagi Yojimbo ne déroge donc pas à la règle. Ce faisant, Stan Sakai se paie le luxe de viser (et d'atteindre) un public très jeune. Il met ainsi en scène des animaux anthropomorphes dessinés de façon simple mais splendide pour mieux attirer l'attention des petits lecteurs sur la complexité des sentiments humains et la pertinence de la philosophie des arts martiaux japonais. Il faut quand même le faire !

Stan Sakaï se révèle ainsi un artiste populaire et humaniste. C'est certainement ce qui lui vaudra du dessinateur William Stout d'être qualifié d'«Akira Kurosawa du comic book». Le compliment est d'autant plus mérité que Usagi Yojimbo est parsemé de référence à la culture populaire japonaise.

Ainsi, le lapin Miyamoto Usagi tire son nom et certaines de ses caractéristiques du samouraï Miyamoto Musashi (1584-1645) [1]. Sabreur de légende (on lui prête plus de 1000 duels victorieux), il est l'auteur du Traité des 5 roues. Ce classique des classiques de la littérature japonaise constitue un ouvrage de référence en matière de tactique martiale. Il inspirera par ailleurs aux hommes d'affaires nippons une approche contemporaine en matière de stratégie de management.

C'est à Yoshikawa Eiji que l'on doit la biographie de Musashi Miyamoto [2] intitulée Musashi (en édition française : La pierre et le sabre), véritable œuvre littéraire séminale. On en a tiré :

  • des manga, dont le ma-gis-tral Vagabond de Inoue Takehiko ,
  • trois adaptations pour la télévision,
  • mais surtout sept versions pour le cinéma (dont une de Mizoguchi Kenji).

    La plus célèbre demeure toutefois le triptyque de Inagaki Hiroshi :
  • Samurai Miyamoto Musashi (Miyamoto Musashi - 1954)
  • Duel at Ichijoji Temple (Zoku Miyamoto Musashi: Ichijōji no kettō - 1955);
  • Duel at Ganryu Island (Miyamoto Musashi kanketsuhen: kettō Ganryūjima - 1956).
Détail décisif : dans ces trois films, Musashi est interprété par l'immense Mifune Toshiro [3], qui fut en outre l'un des acteurs fétiches de Kurosawa, avec qui il tourna 16 films.

Mifune Toshiro tient ainsi le rôle-titre dans Yojimbo (1961) de Kurosawa : l'histoire d'un rônin, surnommé Sanjuro, qui prend la défense de villageois vivant sous le joug de deux clans de brigands antagonistes.

Pour sa part, le lapin samouraï de Usagi Yojimbo sera appelé plusieurs fois, au cours de ses pérégrinations, à défendre des villageois contre des hordes de brigands, de vils seigneurs, de ninjas,…

Le personnage de Sanjuro, toujours interprété par Mifune, est de retour devant la caméra de Kurosawa l'année suivante dans Sanjuro. Le rônin vient cette fois en aide à de jeunes samouraïs, qui ont trouvé refuge dans le pavillon où le vagabond a passé la nuit. Leur clan est menacé par un ambitieux et roublard seigneur voisin.

Parallèlement, dans Usagi Yojimbo - tome 1, le jeune seigneur Noriyuki, seul survivant de la famille qui règne sur son clan, trouve refuge dans le pavillon occupé par Usagi, lequel se retrouve rapidement assiégé par les hommes du vil seigneur Hikiji.

Comme on peut le constater ci-dessous, la comparaison entre les deux œuvres ne s'arrête pas à ce lapidaire synopsis.

Cliquez sur l'image pour l'agrandir.

Autre référence graphique criante de Stan Sakai à Kurosawa et Mifune : Le château de l'araignée(1957).


On en terminera avec Kurosawa par un clin d'œil à Après la pluie de Koizumi Takashi. Ce disciple et fidèle assistant-réalisateur de Kurosawa met en scène en 1999 le dernier scénario du maître. Ce film partage avec Usagi Yojimbo – tome 4 une scène de duel contre un lancier au cours de laquelle le rônin cherche à se faire engager au service d'un seigneur.

Notez le titre du chapitre...


Usagi Yojimbo se réfère à bien d'autres classiques de la culture populaire japonaise, notamment deux séries de manga des années 60-70, dont les adaptations cinématographiques connurent un énorme succès public au Japon.

Ainsi, l'un des personnages récurrents de Usagi Yojimbo est un cochon aveugle, recherché pour meurtres. Il est vrai que ce vagabond qui cherche seulement un endroit pour vivre en paix doit constamment se défendre contre des chasseurs de prime. Or, son bâton cache une lame de sabre qu'il manie avec une dextérité étonnante. Le cochon aveugle Zato-ino renvoie évidemment au masseur aveugle Zatoïchi, héros du manga homonyme de Hirata Hiroshi, d'après le conte de Shimozawa Kan. Zatoïchi a lui aussi connu pléthore de transpositions sur grand écran (près d'une trentaine). L'acteur qui l'a incarné le plus souvent est Katsu Shintarô. On signalera particulièrement Zatoïchi meets Yojimbo (1970) de Kihachi Okamoto, dans lequel Katsu croise le fer avec… Mifune Toshiro, lequel reprend pour l'occasion le rôle kurosawaïen de Sanjuro. Stan Sakai n'a pas pu résister au plaisir d'évoquer dans sa BD ce mythique cross-over cinématographique.


Enfin, Usagi Yojimbo nous renvoie à un autre classique incontournable du genre. Dans son tome 5, le samouraï aux grandes oreilles croise le chemin (et le fer) du bouc solitaire et de son petit. L'évocation du grandiose manga Lone Wolf and Cub (traduisez : le loup solitaire et son petit) est irrésistible. Œuvre du scénariste Koike Kazuo et du dessinateur Goseki Kojima, cette autre merveille du manga, a été récemment rééditée aux USA et en France.[4]

Lone Wolf and Cub est plus particulièrement connu des amateurs de cinéma populaire japonais par son adaptation au cinéma dans la série de films Baby Cart (traduisez : le chariot de bébé).


Véritable chef d'œuvre de la bande dessinée, Usagi Yojimbo est, on l'aura compris, un must pour tous les amateurs d'arts martiaux japonais. Ils trouveraient là d'ailleurs une occasion en or d'initier leurs enfants à la philosophie qui s'y rattache. Nul doute qu'ils se passionneraient immédiatement pour les aventures du samouraï aux grandes oreilles. J'en parle d'expérience.
Notes :

[1] Entre autres, alors que Musashi est engagé dans la bataille (historique) de Sekigahara, Usagi a combattu à la bataille de Adachigahara. Les deux personnages sont également tous deux les tenants d'une école d'escrime à deux sabres.

[2] On écrira de préférence Musashi Miyamoto au lieu de Miyamoto Musashi, la langue japonaise commençant l'énoncé des noms de personnes par le nom de famille, suivi du prénom.

[3] Il n'est ainsi pas anodin que le défunt maître du lapin samouraï était le seigneur Mifune.

[4] Les couvertures des différents volumes de cette nouvelle édition sont l'œuvre des dessinateurs américains Lynn Varley et… Frank Miller (encore et toujours).

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15 juin 2007

Les impensées de Pascal

Il y a quelques mois, j’ai entamé sur ce blogue une discussion, par commentaires interposés, avec un dénommé Pascal. Nos échanges (ici et ) portaient sur les sectes et le droit. Les premières interventions de mon interlocuteur, bien que relevant souvent du coupage de cheveux en 64, avaient le mérite de la candeur du non-juriste désireux de pousser la réflexion dans une matière qu'il ne maîtrise pas.

Au fil des commentaires, son argumentation a commencé à tourner en rond. Après un silence de plusieurs mois, je pensais qu’il avait compris la vanité de sa position et la légitimité de la mienne.

Mais non. Le voilà qui sort de son mutisme pour me servir deux commentaires successifs étonnants. Tranchant avec le ton interrogatif de ses précédents messages, ledit Pascal se lance dans une critique ouverte de ma prose. À l’évidence, malgré mes explications répétées et malgré ses précédentes réponses qui montraient qu’il avait saisi mes explications, il se livre aujourd’hui à une véritable volte-face et fait mine de n’avoir rien compris. Dans ces ultimes commentaires, il me prête ainsi des propos ridicules qu’il se fait une joie de décrier. Du genre : « Mais enfin, M. Palisson, comment pouvez-vous affirmer que 2+2=5 ? C’est absurde !» Précisément, c’est absurde. Mais ce qui est encore plus absurde, c’est que je lui ai expliqué plusieurs fois auparavant que 2+2=4 !

Quelles sont donc les véritables motivations de Pascal ? Essayer d’avoir le dernier mot sur un sujet qui lui échappe ? Possible. Pascal fait-il partie de ceux que d’aucuns qualifient de pro-sectes (ou d’apologistes des sectes). Peut-être. Par ailleurs, la mauvaise foi grandissante de ses commentaires m’oriente vers l'hypothèse suivante : Pascal ne chercherait-il pas à me provoquer, à me pousser à exprimer par écrit des propos diffamatoires que d’autres se feraient une joie d’exploiter au plan judiciaire ?

Gageons que ce billet convaincra mon mystérieux correspondant de sortir d’un bien confortable anonymat, ou qu’il le ramènera au mode d’expression qui lui sied finalement le mieux en la matière : le silence.

Voici donc ma réponse à ses derniers commentaires.
__________________________________
L’homme la pampa, parfois rude, reste toujours courtois. Mais l’honnêteté m’oblige à te dire que ton Antoine commence à me les briser menu !
Michel Audiard, Les Tontons Flingueurs

Jusque-là, j'avais été gentil, mais maintenant ça y est, j'ai les abeilles…
Coluche, La bagarre

Bonjour, Pascal.

Vos deux derniers commentaires m’ont quelque peu surpris. Quel spectaculaire revirement ! Ce qui relevait au départ de la participation à une discussion a pris clairement la forme d’un monologue. Votre plaidoyer pro-sectaire ressasse largement des arguments éculés sur la conspiration gouvernementale contre les sectes. Par chance, vous avez eu le temps de fourbir d’autres armes : quel meilleur outil que la rhétorique pour faire dire à un texte le contraire de ce qu’il signifie.

Passons en revue, si vous le voulez bien, vos étonnants arguments :

1- Vous commencez fort en me ressortant le postulat éculé de la secte que l'on vilipende pour escroquerie, alors que des multinationales font de même en matière commerciale. Vous sous-entendez par là qu'il est aberrant que je prône de poursuivre pénalement les sectes, mais pas les sociétés aux pratiques commerciales douteuses. Sauf que :
  • de la part d'un criminaliste, ce genre de prise de position serait proprement stupide;
  • nulle part, je n'appelle à l'impunité de ces sociétés. Pour la simple et bonne raison que je n'en parle pas! Si on pousse plus loin le raisonnement que vous me prêtez, je serais favorable à l'impunité des yakuzas, puisque je n'en parle pas dans ma thèse sur… l'Église de scientologie… Quelque part, j'ai dû rater une marche…

2- Je ne fais pas qu’affirmer ce que je reproche à l'Église de scientologie ; je le démontre (730 pages disponibles en intégralité sur Internet), il n’y a qu’à lire. Maintenant, si ma thèse de doctorat ne prouve rien à vos yeux, il va falloir m’expliquer pourquoi la Scientologie ne m’a jamais attaqué en diffamation, tandis que, dans le même temps, elle tentait d’obtenir, par la petite porte, l’annulation de mon diplôme auprès du Ministre de l’Éducation en personne (excusez du peu). Voir ici

Par la suite, vous déformez magnifiquement mes propos. Je ne reconnais pas, je n’affirme pas qu’il n’existe qu’ une secte nocive (en l’occurrence l'Église de Scientologie) sous prétexte que seule ma thèse aborde le sujet sous cet angle. Je sais que ce concept s’applique à d’autres groupes. Pour ces autres mouvements, je l’affirme et ne le démontre pas. Mais je n’ai pas le loisir d’écrire une thèse de doctorat en droit criminel tous les quatre matins. Le pouvez-vous ? C’est bien pour cela que j’invite les doctorants en droit à s’intéresser à la question. Il y a de quoi faire…

Si l’on suit votre raisonnement, avant ma thèse, il n’y avait aucun exemple fondé de secte nocive. C’était donc la preuve qu’il n’existait aucune secte nocive ! Mais après la publication de ma thèse en 2002, alors là, soudainement, il en existait une. Oui, mais bon, comme c’est le seul exemple du genre, eh bien, cela veut dire qu’il n’existe qu’une seule secte nocive. Et cela reste l’exception. Donc il n’y a pas de phénomène sectaire, donc ce n’est pas la peine de s’y intéresser.

Et quand un autre juriste démontrera la nocivité d’une autre organisation sectaire, alors, on dira qu’il en existe deux. Mais cela restera encore l’exception. Donc il n’y aura toujours pas de phénomène sectaire, donc ce ne sera toujours pas la peine de s’y intéresser. Etc. jusqu’à ce que 50 juristes en arrivent aux mêmes conclusions concernant autant de sectes nocives.

En mathématiques, on dit qu’un théorème est faux dès lors qu’il ne se vérifie pas dans au moins une hypothèse. De ce point de vue, le théorème de l'innocuité des sectes a priori en prend un sacré coup.


3- Vous remettez sur le tapis ma distinction groupes sectaires / autres groupes en laissant entendre que je souhaite en faire une distinction légale. Or, je vous ai déjà expliqué 2 fois qu’il s’agissait d’une distinction juridique et surtout pas légale. Je vous ai déjà dit 2 fois qu’ériger une telle distinction au plan légal constitue une grave erreur. Et je vous ai expliqué 2 fois la différence entre définition légale et définition juridique.
N’avez-vous vraiment toujours pas compris ?! Comment faut-il vous le dire ?


4- Vous affirmez de manière on ne peut plus péremptoire que j’emprunte ma notion de secte nocive à l’UNADFI. C’est doublement faux :
  • Contrairement à l’UNADFI, je distingue la secte de la secte nocive . Où avez-vous vu, dans les écrits de l’association – antérieurement à ma thèse –, le concept de secte nocive ?
  • Avez-vous déjà lu la définition de la secte selon l’UNADFI (et non l’UNADEFI, comme vous persistez à l’écrire) ? L'association définit la secte comme une organisation qui pratique « la manipulation mentale, une triple destruction [de la personne, de la famille, de la société] et d'une triple escroquerie [intellectuelle, morale, financière] ». Je définis la secte nocive comme une « personne morale à but philosophique, spirituel ou religieux dont les organes ou les représentants commettent, pour son compte, des infractions pénales en tant qu’auteur ou complice ». Les ressemblances entre les deux définitions ne me sautent pas aux yeux. Mais ce doit être un symptôme de l’aveuglement du juriste à la recherche de son objectivité perdue…

5- Vous évoquez la liste noire des 172 sectes du rapport parlementaire de 1996 en affirmant qu’elle a été établie sous la dictée de l’UNADFI. Primo, vous affirmez sans rien prouver. Cela était risqué car, secundo, votre affirmation est fausse. En effet, le rapport parlementaire lui-même déclare explicitement que cette liste provient des travaux de la DCRG.

Bien sûr, vous allez me rétorquer que, en fait, le groupe "Sectes" à la DCRG écrit sous la dictée de l’UNADFI. Ben voyons donc ! Ah Pascal, un scoop pour vous, tant qu’on y est : le juge anti-terroriste Bruguière menait ses enquêtes sous la férule de l’association SOS Attentats ! Dingue, non ? Voilà du grain à moudre pour une autre bande de négationnistes de ma connaissance.


6- Votre plaidoyer sur le chômage, en tant que phénomène de société autrement plus inquiétant que la question des sectes, est proprement hallucinant. Si je m'en tiens à votre raisonnement, je pourrais affirmer que le réchauffement climatique est un phénomène plus inquiétant que les conditions de travail dans l’industrie agro-alimentaire. En conséquence, le gouvernement n’aurait pas à se préoccuper de ces dernières !

Comparez donc ce qui est comparable ! Le chômage est un problème économique. Les sectes nocives constituent un problème juridique. Vous comptez résoudre le chômage à coups de commissions rogatoires, de perquisitions et de détention provisoire ?

Vous dites ensuite ne connaître personne dans une secte ; en revanche vous connaissez plusieurs personnes au chômage. Donc, le chômage c’est grave, mais pas le phénomène sectaire. 2 remarques s'imposent :
  • c’est quoi pour vous une secte ? Définissez clairement le terme, et ensuite seulement vous pourrez déterminer si oui ou non, vous connaissez des adeptes de telles organisations. Les scientologues non plus ne connaissent personne qui soit dans une secte…
  • Quelle impressionnante objectivité ! Une rigueur scientifique digne de vos amis sociologues des religions, fervents adeptes de l’observation participative . Dans le même registre pata-sociologique, je connais personnellement un grand nombre de victimes des sectes. Mais je ne connais personne ayant fait euthanasier son chat au cours des deux dernières années. En conséquence, je peux scientifiquement en conclure que, depuis deux ans, l’euthanasie des animaux domestiques n’est pas une réalité sociologique digne d’intérêt.

7- Vous me reprochez d’appeler les pouvoirs publics à donner priorité au phénomène des sectes, au détriment de celui du terrorisme. Pour enfoncer le clou, vous ajouter un indigné et magistral « C’est bien ce que vous dites ?». Et non, ce n’est pas ce que je dis. Mais où avez-vous lu ça ? Votre affirmation est tout simplement mensongère. Comment pouvez-vous oser me prêter de pareils propos ? Vous me prenez donc pour un sombre crétin ? Ou peut-être souhaitez-vous que d'autres lecteurs le croient…


8- Vous vous livrez ensuite à une diatribe sur ma définition de la secte nocive en fonction des adjectifs qualificatifs utilisés. La méthode est tout simplement risible. Je résume : mis à part le côté spirituel, religieux ou philosophique, une secte est une organisation comme les autres.

Oui, bravo ! Impressionnant ! Et une boisson alcoolisée, mis à part l’alcool, c’est une boisson comme les autres. Pourquoi interdire les boissons alcoolisés au volant ? C'est sans nul doute une conspiration de Coca-Cola contre Pernod-Ricard et Johnny Walker ! De même, une organisation mafieuse, mis à part son côté mafieux, c’est une organisation comme les autres. Alors pourquoi le droit devrait-il s’intéresser particulièrement aux organisations mafieuses ? C’est discriminatoire !

Vous écrivez ensuite : « Dans ce sens, ETA et Action Directe, notamment, pourraient être considérées comme étant des "sectes", n’est-il pas vrai ?» Eh bien non, il n’est pas vrai.

Juste une question, en passant : en grammaire, à quoi servent les adjectifs qualificatifs ? Uniquement à embrouiller l’esprit des écoliers, j’imagine…


9- Vous citez ensuite le cas de l’Instinctothérapie, prétendant que ma définition de la secte nocive ne s’y applique pas car le groupement de Guy-Claude Burger ne serait ni religieux, ni spirituel. Et vous citez à l’appui de vos dires une déclaration de Xavier-Martin Dupont, spécialiste et critique de l’organisation de Raël, avec qui je devrais donc forcément être d’accord. Cette analyse simpliste appelle trois remarques :
  • mes conceptions juridiques en matière sectaire sont bien loin de faire l’unanimité parmi ceux qui estiment nécessaire la lutte contre les sectes. Pourquoi devrais-je en ce cas adhérer systématiquement aux dires de l’un d’eux ?
  • Dans les paragraphes précédents, vous estimez que ma définition de la secte nocive est trop large et pourrait s'appliquer à n'importe quelle organisation. Mais soudain, elle vous apparaît trop restrictive et ne viserait pas l'Instinctothérapie ! Il va falloir vous décider…
  • Vous rappelez que ma définition de la secte nocive fait appel au caractère religieux, spirituel ou philosophique d’une organisation. Et soudain, vous ne parlez plus que du religieux et du spirituel, oubliant au passage le philosophique. Votre omission est regrettable, car il est absolument indéniable, au vu des documents internes de l’Instinctothérapie, que de nombreuses pratiques au sein de ce mouvement obéissent à des objectifs philosophiques (voire spirituels) en effet, Guy-Claude Burger définit l'Instinctothérapie comme un « art de vivre [qui] renonce à tricher avec les lois de la nature» [et qui appelle à] prendre conscience de l'absurdité - biologique et spirituelle - de tout artifice recherchant le plaisir en dehors de l'obéissance aux lois premières ».
    Ma définition de la secte nocive n'est donc pas aussi limitée que vous l'affirmez. Vous pensez sans doute que je l'ai écrite d'une traite, en trente secondes, sur le coin d'une nappe en papier, dans une bruyante et enfumée brasserie de Saint-Germain-des-Prés ?

En conclusion, je suis fort déçu que vous fassiez étalage d’une telle malhonnêteté intellectuelle. Avez-vous une raison particulière d’agir ainsi ? Quelque chose dans votre orientation m’aurait-il échappé ? À ma décharge, je dois invoquer le fait que j’ignore tout de vous, si ce n’est un prénom (ou devrais-je dire un pseudonyme ?). Mais il est vrai que l’anonymat est un état tellement agréable pour qui veut fallacieusement critiquer autrui. Vous auriez tort de vous en priver.

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08 juin 2007

Je hais la pop ! Sauf que...

ou

Esmée Denters - la Hollandaise planante

Je hais la pop suave qui envahit les radios et les rayons des disquaires. Robbie Williams et Justin Timberlake me fatiguent à longueur de tubes préfabriqués. Et je dirais même plus : j'exècre la pop latina.

Qu'y a-t-il de plus insupportable que la dernière interview télévisée de BHL ? Le dernier single de Mariah Carey, pardi ! Entendre un morceau ou voir un clip de Jennifer Lopez, de Christina Aguilera et autres Shakira me donne des envies irrépressibles de balancer des pierres sur la platine CD ou l'écran de télé.

Ces divas à deux sous ont exploré une nouvelle fosse abyssale de l'insipidité. Atteintes au dernier degré du syndrôme "Same song, different title", elles font le bonheur des maisons de disques qui capitalisent scandaleusement depuis des années sur le conformisme crasse d'une majorité de paires d'oreilles (ces mêmes maisons de disques qui versent des larmes de crocodile devant le téléchargement sur Internet et l'évolution des nouvelles technologies).

Je pensais jusqu'à hier que mes nausées étaient dues aux chansons, mièvres à souhait et capables de donner la migraine à un cheval de trait. Mais non : les responsables de ce lucratif fiasco artistique, ce sont les chanteuses elles-mêmes !

Sous des allures de haute technicienne des cordes vocales, elles donnent l'illusion de l'émotion. Mais votre dernier frisson en écoutant J-Lo, il remonte à quand ?

La question me semble légitime, car je viens de découvrir que ces niaiseries peuvent faire vibrer, quand elles sont chantées par une chanteuse de vrai talent. En l'occurrence une complète amateure hollandaise de 18 ans...


Le phénomène s'appelle Esmée Denters. Depuis des mois, la demoiselle place sur YouTube des videos de ses performances solo dans sa chambre devant sa webcam, a capela ou à son clavier.

Y a-t-il une explication rationnelle au fait que ses interprétations (dans des conditions précaires) d'effroyables partitions éveillent en moi une certaine émotion ?

Alors vous allez me dire, si elle avait le physique de Jackie Sardou ou (si vous êtes Québécois) de Ginette Reno, ça me ferait sûrement moins d'effet.

Sauf que :

1- Jennifer Lopez n'est quand même pas particulièrement désagréable à regarder. Mais la voir se trémousser dans les clips de ses daubes ont développé chez moi un réflexe conditionné dit de zapping furioso.

2- Même quand j'écoute la jeune Hollandaise en lisant une autre page Web, le charme opère toujours.

Alors quand elle chante une vraie chanson, comme The Dock of the Bay d'Otis Redding, (a capela, live et en position assise, sinon c'est trop facile !), forcément, ça dépote...

Ben oui, parce que, même niveau R'nB, la donzelle assure grave :

How come you don't call me de Alicia Keyes :


Mais encore plus frappant : la comparaison qui tue :

One in a Million chanté par Aaliyah dans un clip à 1 M$ :

et chanté live par Esmée Denters devant sa webcam :

Cherchez l'erreur !

Esmée Denters vient de signer un contrat avec la nouvelle maison de productions de Justin Timberlake. Le chanteur a d'ailleurs déclaré :
Elle chante mes chansons mieux que moi.

Je confirme. Et les faits sont implacables :

Arrêtez donc les intraveineuses de Nouvelle Star, Star Ac' ou Canadian Idol. Prenez plutôt une bouffée d'oxygène sur son site.

Une étoile est née. Et celle-là, elle n'est pas en papier glacé.

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